lundi, juin 12, 2006

Arkham(11)

-« Qu’est-ce que vous avez encore fait ? » commença le photographe, sans autre préambule. Geoff le mit au courant alors qu’ils gravissaient les escaliers pour rejoindre Mantoni et la scène du crime. Hong écouta gravement. Les infirmiers avaient emmené Harry sur un brancard, et il ne restait qu’eux trois dans la maison. Lorsque Mantoni le vit arriver, son visage s’illumina l’espace d’un instant. Puis elle rejoignit la conversation.
-« Salut, Grand Maître de l’argentique et du numérique. Entre donc dans le lieu sympathique où notre cinglé des entrepôts a décidé de refaire des siennes… »
-« Tu penses que c’est le même type. »
-« Oh, tu me connais, moi tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien. N’empêche, il y a des tas de trucs qui me font pencher vers ce genre d’hypothèse : déjà, le type qui est en train de faisander sur le sol était un des habitants des entrepôts, et a priori même un taré courageux rechignerait à s’approcher d’une baraque dans laquelle il sait qu’il y a deux flics pour trucider un pauvre SDF. À moins d’avoir très peur de ce que ledit SDF pourrait raconter auxdits flics.»
-« Sans oublier, continua Geoff qui s’était penché pour ramasser la serviette, ce genre de petite chose… Une charmante petite bête comme ça, ça ne te dit rien ? »
Hong eut un léger mouvement de recul au moment où il découvrit ce qui restait du mille-pattes. Mais il se reprit très vite.
-« C’est une scolopendre. »
-« Gagné. Tu sais où j’ai vu un truc comme ça récemment ? » continua Geoff.
-« Sur un de tes superbes clichés, justement sur la scène du crime des entrepôts. Alors j’ai beau ne rien savoir, je vais quand même commencer à fouiller dans cette direction. » Hong la regardait avec un air sévère. Mantoni tira sur sa cigarette avant de lui décocher un grand sourire. « Mais, comme j’ai été formé par les meilleurs, je vais quand même vérifier ce que je pourrai sur notre ami infortuné. À toi. Qu’est-ce que tu peux nous dire pour l’instant ?»
Hong regarda autour de lui un long moment, prit quelques clichés. Puis il accrocha sa veste à une poignée de porte un peu plus loin, revint, et prit d’autres clichés.
-« Bon, alors on a le point d’entrée, la fenêtre, et le point de sortie, qui est le même. On ira voir en bas pour essayer de savoir comment il est monté. Je suppose que c’était un homme, vu la profondeur des plaies et l’angle descendant des blessures. Étant donné la taille de la victime, je n’exclurai cependant pas une femme, même de taille moyenne, pourvu qu’elle soit passablement musclée. Ça vaut d’ailleurs pour l’homme, il faut une sacrée force pour mettre un coup qui va jusqu’à l’os sur une victime se tenant debout. Surtout que l’arme n’était pas très effilée, comme en témoigne le côté plus déchiqueté que découpé des plaies. Pas de traces de pas visibles, quelques épines de sapin un peu partout, mais ça peut venir de n’importe qui et ne nous apprend pas grand-chose. Je ferai venir les gars du labo pour qu’ils m’aspirent tout ça, il y aura peut-être des fibres. J’aurai besoin d’échantillons de vos manteaux, pantalons, tout ça. L’arme du crime, donc, probablement une machette ou un objet semblable, relativement peu aiguisé. Le problème, c’est que l’angle des plaies ne semble pas cohérent avec cette hypothèse, surtout étant donné la taille de la pièce. »
-« Un hachoir de boucher, un truc comme ça ? » demanda Mantoni.
-« Ça aussi ça m’étonnerait. Je verrai ça mieux sous un microscope. À part ça, on fera un relevé des empreintes digitales, des fluides (ça nous servira déjà à voir si votre SDF est fiché). Et puis je comparerai les blessures à celles de nos cinq autres clients. À ce propos, j’ai quelques résultats intéressants. »
-« Surprends-nous. », l’invita Geoff.
-« Oui. Tout d’abord nous avons très peu avancé sur l’identité des sujets, mais nous avons encore une petite chance de les retrouver grâce aux dossiers dentaires. Pour l’instant on peut juste dire qu’aucun d’entre eux ne se fait soigner les dents à Arkham. Pour l’instant, on tourne un peu en rond de ce côté-là. Mais la vraie mauvaise nouvelle, c’est que les analyses d’ADN sont formelles, les cerveaux retrouvés près des corps n’allaient pas avec les corps en question. Et ça, ça veut dire… »
-« Qu’on n’a pas cinq cadavres sur les bras, mais dix », continuèrent Geoff et Mantoni, de concert.
-« J’en ai bien peur. Bon, allons faire un tour dehors. »

vendredi, juin 09, 2006

Used to it...

We changed. We didn’t mean to. We didn’t want to. But we did. It got complicated, but I guess all things do when they change. But hey, you get used to it. You get used to anything if you’re hungry. It wasn’t that hard, after awhile. Just going to the store, filling your cart. all wrapped in plastic, clean, hygienic. In your fridge, it gleams under the electric light. That kind of pinkish grey. That mother-of-pearl patina. Take it out, fry it, dispose of the package. Then go to bed, fuck, sleep. Maybe toss and turn for awhile, at least I used to at first. But hey, you get used to it. Even the ones working the slaughterhouses got used to it. They get up in the morning, they kiss their wives and kids, and that’s where they go. And when they come back nothing’s changed.

When it all started we would grab them off the street. That wasn’t very smart. I mean, no one was ready, no one understood. It was all so disorganized. We were hungry, maybe scared sometimes. Some of us did OK. One of my friends from work, he used to tell me he went to Thailand. They didn’t care what you did with the product over there, as long as you paid them. Still, you know… It just wasn’t fair for the rest of us who couldn’t afford trips to Asia or Eastern Europe. I mean the poor got a right to eat, too. So we tried different solutions.

In Texas, they thought the Klansmen were acting out all of a sudden. Getting riled up or something. Alright, these guys already are a bit on the crazy side, but they were never that brave. Isolated families, they just disappeared. First time they caught someone though, it was a schoolteacher from Dallas, and he never wore a sheet in his life. Hey, what was he gonna do ? The Klan fellas, they never get caught. He probably thought they’d take the fall. So the DPD locked him up. Eventually, some guys calling themselves the Bloody Dragons of the KKK started writing to him, and actually helped him escape jail. After that, they and him got holed up in some hideout in the country. That was the last anyone heard of the guy, and of the Bloody Dragons. Can’t say I missed them. Other incidents happened.

The hunger made some of us pick the poor, the hunger made a few of us pick the rich. Takes one to catch one, they say… So you caught one of yours, whatever you were. You could go for the people closest to you, they never saw it coming : husband, wife, parents, kids, anything went back then. But you know, there are only so many spouses, parents, kids one can have. And besides, some didn’t like the idea when it was someone they knew : When they’re all gone, it gets lonely. But you get used to lonely too, I guess.

After awhile, we outnumbered them. Whatever it was that changed us, it worked better and better. And we realized we would have to aim for the long run. We couldn’t afford to lose them all. So we put them in camps. We pampered them, fed them, let them breed and get fat. As we watched them in their camps, we started to realize they weren’t that smart. In fact, they were kind of pathetic, actually. They were weak, and not very bright. They were no better than children, really. Pups. Once, they tried to escape, to revolt. So we took some of their privileges away. They weren’t allowed books anymore, or radio, or television. That was pretty dumb of them, revolting like that. And besides, thy had it better than some of us on the outside, having to work for a living. All they had to do was get fat. Some of them just stopped eating sometimes, so we force-fed them with tubes and proteins. They all got fat in the end.

These days, we don’t much think about them. We remember we have the Andersons coming to dinner that night so we go to the store. We buy the blister of premium female cerebellums, but the beasts they come from are nowhere in sight. We unwrap it, we sauté it, we eat it. And we go to bed. maybe we toss and turn for a moment, but not much anymore.

jeudi, juin 08, 2006

Vin Diesel : A Gamer


As some of you may know, I like Vin Diesel. I don't like hime because he was "XXX" or that guy that drives that penis...errr...car in The Fast and The Furious. No, I like Vin Diesel because he is a proud gamer. He came out in Conan O'Brien's show, too, which was respectable. Lately I found a motivational poster for RPG players (at this address). Enjoy !

mercredi, juin 07, 2006

Arkham(10)

Harry Stone était une vraie montagne. Mesurant près de deux mètres, large d’épaules, légèrement bedonnant, il n’aurait pas dépareillé dans un rassemblement de Hell’s Angels. Cette impressionnante carrure lui avait toujours évité les confrontations en tout genre, ce qui l’avait rendu particulièrement calme et posé en toute situation. Alors qu’il sortait doucement de l’évanouissement, il ressentait une confusion qui ne lui était pas coutumière. Non seulement on l’avait agressé physiquement, mais on l’avait maîtrisé en un clin d’œil. Habituellement, on faisait appel à lui pour calmer une situation, pour exercer une influence impressionnante certes, mais bienveillante. Pour éviter, justement, d’en venir aux mains. Et, ici et maintenant, il n’avait pas suffi. Il ouvrit les yeux, lentement, un mal de tête diffus commençant à lui broyer le crâne. Geoff et Mantoni étaient penchés sur lui, l’air inquiet.

-« Me regardez pas comme ça. Je suis pas encore bon pour le cimetière… »

-« Non, mais pour un scanner, sûrement, répondit Geoff, l’air malgré tout soulagé. Essaie de ne pas trop bouger, non seulement tu as peut-être des trucs cassés, mais en plus tu as affaibli le plancher et j’ai peur que tu passes à travers… »

-« Petit malin. »

Mantoni s’assit contre le mur, à quelques centimètres du cadavre de l’animal, auquel elle jeta un regard méprisant, puis demanda :

-« Tu te sens capable de discuter un peu de ce qui s’est passé ? »

-« Au niveau du crâne, ça va… Mais étant donné que je me suis fait assommer dans le même temps que j’ai entendu le bruit, je vais encore être inutile aujourd’hui… »

-« Ouais, ouais, inutile, crétin, bouh, bouh, bouh, que je suis malheureux et inutile et nul… Bon, quand t’auras fini de te lamenter tu pourras essayer de stimuler ton énorme boîte crânienne, s’il te plaît ? »

-« Ouais bon ça va. Il n’empêche que c’est vrai que j’ai rien vu ou presque. »

-« Alors commence par le presque. »

-« C’était un bossu… En tout cas, son manteau remontait bizarrement dans le dos. Et il portait un masque. Avec des mandibules. »

-« Bon, dit Geoff, on est au moins sûrs qu’il y a un lien avec nos mabouls. Reste à savoir pourquoi ils prendraient le risque de nous suivre jusqu’ici et de tuer Stan dans notre dos. »

-« C’était courageux. »

-« Et efficace, remarqua Harry, toujours un peu penaud. »

D’un commun accord, Geoff et Rebecca lui retournèrent un retentissant « Ta gueule ! ». Puis Geoff se leva : l’ambulance et l’équipe de Hong arrivaient.

Matthew Hong était un petit homme d’une quarantaine d’années. Toujours vêtu d’un blazer brun, les coudes recouverts de pièces de cuir (de dinosaure, sans doute, avait toujours supposé Geoff), et ne se déparant jamais d’une de ses nombreuses mallettes à photo, il donnait l’impression de perpétuellement fulminer. Il marchait excessivement vite pour un homme de sa taille mais, devant son air décidé, la plupart des obstacles vivants ou non semblait s’écarter de sa route. « Étrange, pensa Geoff en le regardant arriver, comme on peut se tromper sur les gens… » Lorsqu’il avait rencontré le technicien, il avait tout d’abord été frappé par son ton sec et ses déclarations sans équivoque. Il avait au départ eu beaucoup de mal à l’apprécier mais, à la « demande » de Mantoni (« Tu vas voir Hong et tu te tais. »), il avait été obligé de plusieurs fois travailler avec lui. Lors d’une enquête particulièrement sanglante sur laquelle ils avaient bossé tous les deux, ils avaient fini assez tard et s’étaient permis une bière fraîche sur l’une des quelconques terrasses de la faculté de médecine. C’était là, en devisant de tout et de rien avec Hong, que Geoff s’était aperçu qu’il s’était complètement trompé sur son compte : Il n’était pas, comme il l’avait d’abord pensé, une bête de travail insensible et imbue d’elle-même, mais un professionnel acharné croyant dur comme fer que son métier pouvait aider à rendre le monde un petit peu moins glauque. En se plongeant dans la misère, le sang et les larmes, Hong permettait au reste de la population de vivre sans avoir à y plonger elle aussi. Et ses manières peu orthodoxes étaient une manière de se protéger de la misère dans laquelle il baignait continuellement. Depuis ce jour, Geoff respectait énormément le photographe et, si leurs rapports ne pourraient jamais être qualifiés de cordiaux (le mot cordial même semblait saugrenu quand Hong était concerné), ils s’appréciaient mutuellement et travaillaient de manière extrêmement efficace. Il s’approcha pour lui serrer la main.