lundi, novembre 06, 2006

Arkham(16)

Geoff rengaina. Il était convaincu qu’il ne restait plus de créatures. Néanmoins, prudent, il décida de faire le tour du propriétaire. Marco était resté paralysé depuis qu’il avait abattu le dernier arthropode. Il lui fit un signe de la main. Pas de réponse. Bon, il allait gérer ça, une fois qu’il se serait occupé de ses blessures. Il se rendit à la salle de bains, allumant toutes les lumières sur son passage, vérifiant chaque recoin de l’appartement, du sol au plafond, dans chaque pièce. Il sentait de plus en plus sa blessure à la main, et son visage lui semblait enfler à chaque pulsation de son cœur. Il se sentait nauséeux. Il s’appuya contre le mur de la salle de bains, alluma la lumière. Il ne se reconnut pas immédiatement dans le miroir. Son visage était tuméfié, comme s’il avait été roué de coups. Sa peau avait noirci autour de la blessure, livide ailleurs. Ses yeux étaient rouges. La nausée revint en force. Geoff saisit une bande de gaze, puis revint dans son salon, où Marco n’avait pas bougé. Il lui tendit ses clés. « Il va falloir que tu m’emmènes, je crois. » Marco le dévisagea, sans mot dire. « Prends ces putains de clés, Marco. » tenta-t-il, toujours très calme. A la mention de son nom, Marco sembla reprendre un minimum pied dans la réalité. Néanmoins il ne bougea pas assez vite. La nausée, la douleur, la sensation que tout son corps allait le trahir se mêlèrent en lui dans un tourbillon sans fin. Et il tomba au sol, sans connaissance.

Lorsqu’il revint à lui, il était dans sa voiture. D’après les lumières qui filtraient par le pare-brise arrière, il n’était pas resté trop longtemps dans le cirage, à moins que Marco n’ait vraiment rien fait pendant un très, très long moment. Mais il en doutait. Il avait suffisamment vu de gens se relever après un choc pour savoir que son ami avait fait à peu près comme tout le monde : se réveiller soudain et agir en mode semi automatique, laissant la scène terrible et ses implications en attente. Il allait passer des sales nuits, Geoff le savait. Il allait se réveiller en sueur un certain nombre de fois, peut-être. Mais pour l’instant, il faisait exactement ce qui devait être fait. Ses mâchoires étaient crispées cependant, et son expression celle d’un homme entièrement dépassé par les événements. « Va moins vite ou je te mets un PV… » coassa-t-il. Le poison, le combat, l’avaient laissé complètement déshydraté. Marco jeta un œil dans le rétroviseur, ralentit... Geoff tenta de lui sourire, mais d’après l’œil inquiet qu’il reçut en échange, sa condition ne devait pas s’être améliorée. « Je me sens un peu mieux, t’en fais pas… » mentit-il en se redressant un peu. « Si tu veux parler, je crois que je suis en état. »
-« C’était quoi ces trucs, demanda Marco. »
-« Mille-pattes »
-« Mais euh… ça existe vraiment ces trucs ? Je veux dire, en vrai qui attaquent les hommes et tout et tout ? »
-« Manifestement, oui. »
-« Il va falloir qu’on fasse venir un exterminateur ou un truc comme ça, tu crois pas ? »
-« Ouais, on fera ça. »
-« Et toi, toi tu as tiré dessus avec ton arme de service. »
-« Ils m’ont cherché. »
-« Mais tu es souvent confronté à ce genre de choses ? »
-« Habituellement non, mais ces temps-ci… Disons que je n’ai pas été surpris. »
-« Ah… C’est bien… » Marco jeta de nouveau un œil dans son rétroviseur. Son expression montrait clairement que ce n’était pas bien du tout, mais que son cerveau ne serait pas capable de produire plus avant une petite pause. Ca tombait bien. Les urgences étaient l’endroit idéal pour réfléchir.